lundi 23 janvier 2023

Sonnet sur écoute : la cabane





À Étival-lès-le-Mans, au milieu d’un bois,
Il y a des tipis dressés. J’allume mon micro.
C’est l’hiver, [quelqu’un tronçonne] le jour va tomber.
Ces chapiteaux de bois [bruit du vent] vermoulu

Sont construits [pépiements d’oiseaux] par des enfants.
[on entend la circulation] Je me souviens
Du temps des cabanes [le son est clair dans le froid]
Elles étaient petites [le bois mort craque] et moins belles.

Les constructions reposent [des pas dans le sentier]
Sur le tronc porteur d’un chêne. [bruissement du feuillage]
[pie qui jacasse] Le sol est tapissé d'humus.

Pénombre à l’intérieur. [bruits blancs] Le jour traverse 
La cloison du lieu perdu [aboiements] mais pas
Désaffecté. [je m’entends] J’éteins mon micro.

samedi 14 janvier 2023

L'Extravivant

    Il rampe, ou il marche, ou il nage. On sait qu’il existe quelque part, ailleurs, sur un lointain corps céleste. Il y est parfaitement seul et unique, ni tout à fait mort, ni tout à fait vivant.

    Quand il n’est pas pris dans la glace de sa planète morte, il remue la poussière d’un sol brûlant. Tout ce qu’il laisse derrière lui ce sont des sillons, des canaux, des canyons à des années-lumière de la Terre.

"Ailleurs, sur un corps céleste." (vue d'artiste)

    Quelle taille peut-il bien faire ? Difficile à dire. On sait qu’il n’aime pas boire et qu’il ne mange pas. Les pores de sa peau couleur cendre absorbent des substances cuites et recuites par quelque soleil inconnu.

"Les pores de sa peau couleur cendre." (vue d'artiste)

    Il sait ce qu’il fait sans y penser. Il est le plus souvent immobile, pareil à une roche. Il sait bien que sa place est infime dans l’univers.

    Il mue avant chaque ère glaciaire et sa peau est neuve quand revient l’impossible été. Le reste du temps, il survit. Il est seul. Il avance pour faire le tour de son monde, de ce monde dont il est le seul habitant.

"Il mue avant chaque ère glaciaire." (vue d'artiste)

    Parfois il se morcèle, ça lui est déjà arrivé. C’est sans importance. Il ne voit pas où est le problème. Il ne voit pas. Il est aveugle. Il respire, il avance, il continue. Il n’a pas besoin d’en faire plus. Pour quoi faire ?

"Parfois il se morcèle." (vue d'artiste)

    Il sait qu’il est quelque part depuis longtemps et puis c’est tout. Il s’en accommode. Il passe ses journées à se faire une raison. Selon les températures, le temps se dilate ou se rétracte. Les heures du jour et de la nuit sont tantôt longues, tantôt courtes. Il dort un peu, il veille un peu. Il fait avec.

    Il pense à peine. Il respire. Il fait bloc. Il a son monde à lui, loin, très loin du nôtre, qu’il parcourt en rampant, en marchant, en nageant. Qu’importe. C’est l’extravivant.

"C'est l'extravivant." (vue d'artiste)


mardi 3 janvier 2023

Le Semainier (Décembre 2022)


Journal
PoèmeUn
Septain
Semaine
UnHepta
Syllabe
ParJour

Semaine 48, 2022

Tilleul, érable ébranchés
Courant coupé, mangé froid
Eventré mon sac de livres
Bois mort, massif effeuillé
Aperçu un sanglier
Un bol d'air avant d'écrire
Zazen face au radiateur

Semaine 49, 2022

Temps gris perle envahissant
Grand soleil froid glaçon d'air
Feuille unique et d'or d'érable
Couleur pastel gras des choux
Peint des lapins d'encre et d'eau
Gelée blanche et l'aube est rose
Sur les plants fanés du givre

Semaine 50, 2022

Le jour seul balaie le givre
Un lavoir illuminé
Sel, sable et verglas en ville
Le feu ronronne et pétille
Ciel de déserts et de dunes
Petit matin monochrome
Tout dort sauf les oiseaux vifs

Semaine 51, 2022

Du bleu marine aux aurores
Pluie, brouillard, pluie, écureuil
Sans sommeil, puis sans patience
Toux, jeux et cris d'enfants sages
Hébété à fleur de peau
De sale humeur cotonneuse
Feu froissé de papiers gras




Vieil océan, ballade (I,9)

À Kevin Saliou                                                        Vieil océan de cristal bleu, Hématome azuré du monde Marquant la pea...