dimanche 5 octobre 2025

Volume horaire, mai 2024 (1/12)

 
Quoi qu’on fasse, une journée
ne compte que vingt-quatre heures.
Les quatrains suivants s’en accommodent,
tous écrits en vingt-quatre mots.
 

 
 
À mon bureau, le 01/05/24 à 19h30        

Du matin au soir le ciel
est resté gris. Il a plu.
J’écris le front chaud de
ne pas avoir pris l’air.


Dans la cuisine, le 07/05/24 à 11h12        

En attendant que l’eau bouille,
je regarde le vol des rapaces,
tout en cercles et en volutes.
Le ciel paraît bas de plafond.


Dans la serre, le 08/05/24 à 13h58        

La serre en forme de voûte,
constellée par la condensation qui brille,
ressemble à un plafonnier de gouttes
glacées au milieu de la fournaise.


À mon bureau, le 13/05/24 à 12h19        
        
Une abeille est entrée en trombe
par la fenêtre et vole bruyamment
autour des rayonnages de la bibliothèque
pour faire des livres son miel.


Dans le salon, le 14/05/24 à 7h52        

Lire le journal d’Huguenin avant
d’aller étendre une lessive et
de s’occuper des semis. Après
ça, trouver le temps d’écrire.


Laval (Grande rue), le 15/05/24 à 18h44        

Seul devant un pas-de-porte,
un petit garçon tient une paille.
En me voyant passer, il dit :
« Je vais aspirer tout le monde ! »


À mon bureau, le 16/05/24 à 11h29        

J’écris en écoutant les oiseaux
piailler. Elle est loin l’époque
où je fréquentais les cafés bruyants
pour écrire au milieu des bavardages.


La Fontaine (Chaufour), le 17/05/24 à 15h28        

Sous le petit appentis, en tailleur,
à l’abri de la pluie.
Laissé en plan sous l’averse,
le bûcheronnage attendra la prochaine éclaircie.


Le Mans (parc de Tessé), le 18/05/24 à 17h51        

Sous les branches du ginkgo biloba,
quatre jeunes branchés jouent au spike ball
sur un fond de musique électro
que la bière blonde rend légère.


Dans la serre, le 19/05/24 à 21h13        

Très peu de limaces ce soir
autour des plants de courges spontanées.
La potentille s’arrache par poignées
et les pousses de chénopodes sauvages.


Dans la cour, le 20/05/24 à 11h08        

Sur le gravier devant le box :
une chaussette orpheline au talon ensanglanté
avec des pattes gantées de cuir.
Une taupe tuée par un chat.


Chez G. et W., le 21/05/24 à 22h17        

Pendant qu’on parle jeux olympiques
et que passent les Beach Boys,
le vieux chat sur son pouf
dort sous une serviette en papier.


Le Mans (rue du Port), le 22/05/24 à 13h26        

Sur une place réservée aux livraisons
gît une patte coupée de pigeon.
Les doigts griffus, bien à plat,
comme une feuille dans un herbier.


Dans la cour, le 25/05/24 à 19h42        

Devant la friteuse, sous un parasol
à l’abri de la pluie.
Les beignets cuisent dans la végétaline
et se retournent comme des poissons.


Laval (rue de la Fuye), le 26/05/24 à 17h34        

Les uns somnolent au salon et
les autres discutent politique à table.
Par la fenêtre ouverte du balcon,
j’entends le chant du coucou.


Dans le lit, le 27/05/24 à 15h46        

Par un silence d’après-midi,
quand fond toute envie de travailler,
nous avons dormi côte à côte
pour que nos rêves se touchent.


La Fontaine (Chaufour), le 28/05/24 à 14h26        

Un cousin affolé pris dans une
toile d’araignée laisse sa patte
et s’envole. La prédatrice arrive
mais délaisse, déçue, le maigre gibier.


Dans la cuisine, le 30/05/24 à 13h47        

La pluie et l’orage plongent
toute la pièce dans l’obscurité.
Vient une éclaircie et de nouveau
intérieur jour, intérieur nuit, intérieur jour.


Coulans (Ferme de La Moncesière), le 31/05/24 à 17h08        

Devant la grange, dans une flaque
boueuse et grande comme une mare,
quatre gamins braillards lancent des pierres
qui font des ploufs sans ricocher.


Volume horaire, mai 2024 (1/12)

  Quoi qu’on fasse, une journée ne compte que vingt-quatre heures. Les quatrains suivants s’en accommodent, tous écrits en vingt-quatre mots...