Quoi qu’on fasse, une journée
ne compte que vingt-quatre heures.
Les quatrains suivants s’en accommodent,
tous écrits en vingt-quatre mots.
11, rue du Kreisker (Bohars), le 01/12/24 à 13h36
Le soleil tombé derrière la vitre
du séjour me chauffe le dos
et ses rayons rasants se brisent
net au cristal des verres vides.
La Fontaine (Chaufour), le 02/12/24 à 13h32
J’ai trouvé devant la porte
un oisillon mort que les chats
ont sûrement tué. Il est beau
comme une fleur de violette séchée.
Dans la cuisine, le 03/12/24 à 10h13
Une mouche remonte lentement la vitre
sans voler. Elle fait des pauses,
regarde dehors, l’air de dire
« Comment peut-il faire aussi froid ? »
Dans le hameau, le 04/12/24 à 13h10
Deux moutons blancs, deux moutons noirs
derrière la clôture comme une portée
de musique et ses quatre notes :
deux longues, deux brèves qui bêlent.
Rue des Minimes (Le Mans), le 06/12/24 à 11h26
Les passants marchent à contre-jour,
aveuglés par un soleil tiède. Pressés,
ils passent devant l’accordéoniste qui
joue dans un pan d’ombre.
Les Grillades (Sillé), le 07/12/24 à 14h30
Ni vraiment triste, ni vraiment heureux,
un homme seul mange une glace,
cuillerée après cuillerée, consciencieusement, en regardant
sa serviette en papier toute froissée.
Au lit, le 08/12/24 à 01h54
La bourrasque joue de l’ocarina
et de la flûte en soufflant
sur le toit et la cheminée
sa partition pour instruments à vent.
La Fontaine (Chaufour), le 10/12/24 à 13h28
Perché sur une échelle, je nettoie
les chéneaux bouchés par ces feuilles
mortes de chêne qui, devenues terreau,
font de ces gouttières des jardinières.
Rue Barbier (Le Mans), le 12/12/24 à 13h05
Dans la rue en pleins travaux,
un pigeon blanc picore un quignon
de pain qu’il fait tournoyer
sur lui-même comme une toupie.
Au jardin, le 16/12/24 à 15h19
Vider le seau plein de compost
sous un tas de ronces sèches
et de branches de saule coupées
comme on balaie sous le tapis.
Médiathèque L. Aragon (Le Mans), le 18/12/24 à 14h24
Coiffé d’une large chapka noire,
un vieillard cherche dans sa poche
de la monnaie. Contre la machine
à café, sa canne est posée.
Depuis la fenêtre, le 19/12/24 à 11h56
Le vent secoue la cime effeuillée
des chênes balayant de leurs branches
ces petits nuages grisâtres et poussiéreux
qui encombraient le bleu du ciel.
des chênes balayant de leurs branches
ces petits nuages grisâtres et poussiéreux
qui encombraient le bleu du ciel.
La Fontaine (Chaufour), le 20/12/24 à 13h40
On dirait des os de baleines
échouées à des kilomètres du rivage
ce tas de branches de bouleau
blanchies, longues et recouvertes de lichen.
À la fenêtre de mon bureau, le 21/12/24 à 11h08
Sur chaque carreau de la fenêtre,
un carré de condensation trouble encore
le paysage pour n’en garder
qu’un vert humide et flou.
9 allée L. Vincent (Laval), le 22/12/24 à 12h39
Sous la pluie, deux gros choucas
marchent clopin-clopant devant une pancarte
publicitaire pendant que le vent remue
les fruits tardifs d’un olivier.
Rue des chevaux (Laval), le 26/12/24 à 11h19
Une odeur de sarment de vigne
brûlé s’échappe de ces cheminées
de grande maison bourgeoise. Mon frère
dit : « Ça sent comme chez mamie. »
Rue du Mans (Conlie), le 27/12/24 à 18h01
À la nuit tombée, traverser seul
ce grand parking aux néons blancs,
les mains, le dos bien chargés
de courses. Noël paraît si loin.
Fenêtre de la cuisine, le 28/12/24 à 12h06
Le fagot de branches de saule
perd peu à peu ses feuilles.
D’un blanc polaire, elles ressemblent
à des confettis de ciel composté.
Dans la cuisine, le 31/12/24 à 9h56
Les deux hémisphères d’une mandarine :
l’un orangé, l’autre recouvert
d’une moisissure blanche. On dirait
la lune à son dernier croissant.

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