samedi 15 octobre 2022

Le Dictaphone

En me promenant l'autre jour dans un vide-grenier, j'ai trouvé quelque chose qui dépasse tout ce qu'on peut imaginer d'étrange.

Il s'agit d'un vieux dictaphone des années quatre-vingt-dix qui avait, à l'époque, l'intérêt d'être portatif. Hormis les piles qui avaient fondu à l'intérieur de leur compartiment et dégageaient une odeur forte et salée, l'appareil était, une fois nettoyé et rechargé, en parfait état de marche. Sur le chemin du retour, j'avais eu le temps de me demander quel genre d'enregistrement il pouvait contenir. J'étais persuadé que la cassette n'était pas vierge et c'est cette intuition qui m'avait poussé à l'acheter. Oui, je voulais éprouver cette joie secrète et mesquine qu'on ressent en écoutant avec indiscrétion ses voisins se disputer, depuis le pallier qu'on traverse, lentement, le temps de satisfaire sa curiosité. Je ne recherchais qu'un plaisir facile et distrayant, mais j'étais à vrai dire très loin du compte. J'allais passer des heures tourmentées à écouter et réécouter cette cassette.

Pour vous donner une idée très précise de ma trouvaille, et afin de garder une trace de ce document, car vous vous doutez bien qu'après une nuit d'écoute, la bande était inutilisable et la cassette bonne à jeter, j'ai retranscrit ces 12 minutes 46 secondes d'enregistrement. La tâche n'a pas été sans difficulté : la voix qu'on entend, une voix de vieil homme, était sourde et comme étouffée. Il m'a fallu la nuit entière pour taper intégralement son contenu, un casque audio sur les oreilles, le cœur battant si fort que je sentais mon pouls contre les oreillettes. Il faut préciser que l'enregistrement était déjà médiocre à l'origine et qu'il m'a fallu parfois mettre entre crochets les mots que je n'ai pas pu saisir. Je me suis appliqué, surtout, à ne pas dénaturer la voix caverneuse d'un vieil homme qui, s'il ne délire pas, a vécu des choses extraordinaires. Naturellement, je n'ai aucune image, ni nom, ni prénom ni aucun document d'aucune sorte sur l'homme en question et je regrette amèrement de ne pas avoir fouillé plus longuement le carton dans lequel se trouvait le dictaphone, au vide-grenier : il aurait pu contenir des éléments éclairants sur ce mystère.


PREMIER ENREGISTREMENT


Voilà je suis chez moi [il s'éclaircit la gorge] et je vais [silence] et je vais raconter rapidement ce qui m'arrive depuis ce matin [nouvel éclaircissement de la gorge] voire depuis quelques temps [silence] enfin peu importe [profonde respiration] J'ai des maux de têtes des élancements qui m'empêchent de me concentrer sur ce que j'ai à dire c'est pénible [soupir qui crée des parasites dans le micro] Bon [silence] Ça n'a rien de [il semble chercher ses mots] bizarre mais [silence] mais ça me réveille tous les matins ces élancements dans le crâne mais c'est pas de ça que je veux parler alors voilà j'habite tout seul dans une maison [silence, on imagine qu'il fait des gestes pour la schématiser] Voilà une maison toute simple quoi et en bordure de ville [il se gratte la tête] et il y a des champs tout autour de chez moi [toux bruyante] il y a des champs oui ou plutôt des terrains laissés à l'abandon ouais plus personne n'y fait rien de rien pas moi non plus hein [rires] oui pas moi non plus j'ai soixante-quinze ans je suis fatigué maintenant [murmures inaudibles, il parle dans sa barbe] Donc depuis quelques temps mais il me semble que c'est depuis toujours c'est tellement désagréable pour moi oui j'ai la sensation d'être [petits balbutiements] d'être non je n'en sais rien [rire haut perché qui surprend] peu importe [il se racle la gorge] enfin oui quoi je me regarde dans le miroir et c'est moi sans être moi oui je me reconnais bien sûr mais il manque quelque chose vous comprenez [il allume une cigarette] Il n'y a pas grand'chose à dire de plus si ce n'est que ça me chiffonne [on entend son briquet à plusieurs reprises] Je me sens aussi oppressé là à la poitrine c'est désagréable [il dit ça avec une voix affectée] Je me sens drôle et ça s'estompe vers midi environ après je vais mieux [il tire sur sa cigarette] Je mets une heure à me réveiller [il expire la fumée, légers parasites dans le micro] ouais une heure c'est très désagréable [silence] Alors j'ai envie de rien je vais au salon et je réfléchis c'est comme ça que je me suis dit que je pourrais utiliser le dictaphone pour me désennuyer [rires] oui je me suis dit que j'allais parler là-dedans [bruits parasites, il doit être en train de tapoter le micro] Je ne sais pas trop pourquoi mais c'est mon fils qui me l'a offert c'est vrai que j'aime pas trop écrire et je préfère parler [gros rire] aujourd'hui je commence à en avoir marre merde [silence] c'est vrai que c'est une drôle d'idée de parler tout seul mais ça m'occupe ça fait du bien c'est la première fois que je fais ça [bruit guttural] c'est vrai que j'ai des problèmes et que je ne sais pas toujours comment les raconter correctement [pause suivie d'une longue expiration] d'abord je suis tout seul mais je vais pas m'étendre c'est pas ça le problème du jour [reniflement] même si c'est vrai que je suis seul [silence] tiens j'entends la cassette tourner [rires] ça veut dire que ça enregistre pour de bon ah ça fait drôle de parler là-dedans tout seul [rires] On a l'impression de laisser un message sur un répondeur ça fait un peu ça on dirait [silence] mais personne ne l'écoutera c'est surtout ça la différence [pause, il se mouche] Oh ça vaut mieux de toute façon [il s'éclaircit la gorge] c'est pas banal c'est pas banal [il tousse] Oui j'ai l'impression que je suis timide avec ma propre voix [rires] bon donc aujourd'hui c'est un jour normal mais un jour normal au milieu d'autres jours normaux ça le rend anormal vous comprenez [courte pause] ça le rend sombre oui quelque chose comme ça et puis il y a des choses étranges comme le tas dans le jardin depuis hier et puis l'odeur [il reprend sa respiration] oui c'est plus ce genre de choses mes problèmes le tas et puis l'odeur [il tousse] ça sent mauvais ça prend la gorge et le tas dans le jardin n'était pas là la veille ça c'est quelque chose [il est brusquement en colère] ça me dérange je n'ai pas peur mais c'est très curieux non je n'ai pas peur mais c'est inhabituel voilà c'est le mot inhabituel [il reprend sa respiration] Quand on est vieux ce qui change de l'habitude ça surprend toujours un peu [légers rires] c'est tout je remarque une odeur et un tas et je crois que l'odeur vient du tas [il réfléchit] Oui c'est corroboré [?] je crois que c'est comme ça qu'on dit [pause] Je ne sais plus mais tout ça est lié il faudrait que j'aille voir le tas car j'ai une mauvaise vue et puis il me faudrait plutôt un appareil photo plutôt que cet engin ou même une caméra pour montrer le tas à quelqu'un et prouver aux gens que ça pourrait intéresser que je ne rêve pas [il reprend sa respiration] Je vois rien depuis ma baie vitrée mais je devine le tas et il n'était pas là hier je m'en serais rendu compte quand même je suis toujours dans mon salon [il rallume une cigarette] Ouais un tas un tas quoi [il doit être en train de regarder pas sa baie vitrée, le son est de moins bonne qualité : il a dû s'éloigner du micro] Et la mauvaise odeur [claques les cuisses] Je ne sais pas comment vous dire [il s'est rapproché du micro] ça ne sent pas le fumier ou je ne sais pas quoi les égouts le le [il cherche ses mots] enfin ça ne sent rien que je connaisse merde à la fin [il semble en colère] non c'est une odeur très forte [on entend « berk » ou « bon » ou « bah », difficile à dire] Je vis dans une petite commune et encore je vis très retiré et je peux dire que je n'ai jamais rien senti de tel y a rien y a pas je sais pas une usine ou quelque chose comme ça qui peut puer non [il a l'air agacé] d'usine ou même de déchetterie non [il cherche en marmonnant] Non y a rien y a les champs là ma baraque et mon jardin [on l'entend se gratter le menton] Ah et puis y a aussi ce putain de tas comme si ça suffisait pas bordel [il est très énervé, on l'entend taper du poing sur la table] là je suis contre la fenêtre j'ai le nez dessus eh bien il est encore là le con je vois toujours le tas tout trouble à cause de ma vue je vous jure [on entend un grincement de chaise, il doit être en train de s'asseoir] ah ça me fatigue ces emmerdements ce que je vais faire c'est que je vais aller le voir pour de bon ce tas le voir de près avec mes yeux merde [il est tellement énervé que le son grésille, on entend de nouveau la chaise grincer puis quelques pas et le bruit de sa baie vitrée qui coulisse on l'entend au loin crier « je ne vais pas appeler la police ou la gendarmerie quand même non c'est pas un nid de frelons au moins» puis très faiblement et de plus en plus faiblement jusqu'à ce que le son devienne inaudible : « non non c'est trop haut [ou « trop beau », on entend mal] » ensuite on entend des chants d'oiseaux au loin, car la baie vitrée est restée ouverte, pendant une trentaine de secondes. Tout d'un coup, on l'entend rentrer précipitamment, le souffle presque coupé en hurlant des propos pratiquement inaudibles : « non non ça fait presque cinq mètres oui ça fait... » puis il saisit le dictaphone et le coupe]


DEUXIÈME ENREGISTREMENT


Je rallume mon appareil pour dire ce que j'ai vu tout à l'heure [pause, il reprend son souffle, il a l'air tendu] J'ai eu très peur puis je me suis calmé [il tousse] ça m'a bien pris une heure [silence] Je suis allé voir le tas c'est un amas de un amas de [silence] je suis trop faible pour dire de quoi tant pis je ne suis pas encore prêt pour ça [silence] oui je ne veux pas réaliser encore [longue pause puis, très en colère] c'est bon j'éteins [il coupe le dictaphone]


TROISIÈME ENREGISTREMENT


Je n'ai pas dormi cette nuit j'ai pensé au tas dans mon jardin et je ne sais pas quoi faire [long silence, on l'entend marmonner] comme je n'arrivais pas à dormir je me suis levé pour aller voir le tas même si je ne sais pas encore quoi en faire [silence, il réfléchit] J'y suis allé avec ma lampe torche car il faisait nuit noire et je voulais bien tout voir nettement pour ne pas dire ici n'importe quoi et parler en connaissance de cause [mots inaudibles prononcés à voix basse] J'ai même pu toucher mon tas [rires] mais je ne sais plus ce que je voulais dire sauf peut-être décrire le tas eh bien d'abord je ne m'étais pas trompé l'odeur vient de là mais je m'y suis fait et je n'avais pas du tout peur en voyant le tas [silence] oui pourtant c'est un monticule oui on peut dire que c'est un monticule c'est un monticule de corps j'ai dit le mot c'est plein de corps [son débit est très rapide] enfin quand j'ai vu que c'étaient des corps je suis quand même parti pour m'éloigner jusqu'à ce que je vois de nouveau flou pour me rassurer puis je me suis rapproché petit à petit pour voir que c'étaient bien des corps et c'est là que j'ai touché [long silence] Bon mais si c'est pas aussi effrayant que je l'avais cru c'est parce que [rires] c'est parce que ce sont mes corps ou plutôt plein de corps qui me ressemblent si j'ai bien vu avec la lampe torche [il reprend son souffle] pas n'importe lesquels donc [voix basse et affectée] des corps immobiles peut-être morts et qui me ressemblaient et ça n'avait rien de [il cherche le mot juste] rien de morbide mais je préfère m'arrêter là car j'ai mal à la tête et il est très tard [il éteint laborieusement le dictaphone]


QUATRIÈME ENREGISTREMENT


J'ai passé la matinée sur mon tas pour voir à la lumière naturelle tous ces corps qui ont dû m'appartenir je ne vois pas d'autres explications [il s'éclaircit la gorge] hier soir je les ai touchés pour voir s'ils remuaient un peu mais pas du tout mais ils sont pas raides non plus on dirait plutôt qu'ils dorment les uns sur les autres pourtant ils sont froids [il allume une cigarette] et donc oui j'ai remué mon tas pour voir ceux du dessous et ceux-là sont toujours comme moi ils me ressemblent parfaitement mais ils sont plus jeunes c'est-à-dire que c'est moi en homme mûr puis moi en jeune homme adolescent enfant etc [il dit ça avec beaucoup d'assurance] Plus je vais à la base de mon tas plus je remonte dans le passé de mon corps je ne sais pas si je suis très clair [rire de circonstance] Il faut croire que j'ai eu plusieurs corps pour une seule vie ce qui est surprenant voyez-vous [il continue ce monologue d'une voix très sûre et un peu désagréable, on l'entend tirer sur sa cigarette] J'ai eu pour ainsi dire plusieurs enveloppes qu'on a disposées en tas dans mon jardin de la plus ancienne à la plus vieille voilà tout c'est très simple [il rit en toussant] oui j'ai vu ça comme le mystère de la mort enfin éclairci pour moi c'était [il ne finit pas sa phrase] même pas inquiétant non mais [il fait un bruit avec sa langue qui pourrait dire « ça en dit long »] je vais m'arrêter là j'ai besoin de réfléchir [il éteint le dictaphone]


CINQUIÈME ENREGISTREMENT


Je suis très heureux de mon tas je le fais fructifier tous les jours car je meurs assez souvent ces jours-ci je l'ai remarqué mon tas grossit à vue d’œil de jour en jour c'est très original [il dit cela d'une voix claire et gaie] oui ça me plaît bien en fin de compte [silence pendant lequel on l'imagine sourire] eh oui le lendemain hop le corps de la veille le mien hop finit au-dessus du tas avec les autres et si je me lève assez tôt pour aller voir eh bien il est encore un peu chaud de sommeil [rires] Parfois j'ai du mal à m'endormir car je me demande tiens quand est-ce que je vais finir sur le tas et quand est-ce que mon corps de demain va remplacer celui-là dans mon lit c'est une histoire de fou [il a l'air agité puis, long silence] c'est en quelque sorte mon fumier [rires] ah oui et puis c'est mieux que les souvenirs et les photos et tout ça car j'ai devant moi dans mon jardin toute ma vie passée que je peux feuilleter en soulevant une à une mes carcasses [soupir de contentement] oui il suffit de soulever les corps ça demande un peu d'effort mais ça vaut la peine et donc plus on descend dans le tas que je creuse de l'intérieur un peu comme le cratère d'un volcan eh bien plus je descends plus je tombe sur les corps de ma jeunesse mais ce sont aussi les plus détériorés fatalement [pause, j'imagine qu'il écrase sa cigarette, on entend le cendrier qu'il pose sur la table, à moins que ce ne soit un verre] Je sais ce que vous allez dire c'est sale les corps eh bien non d'abord parce que ce sont les miens et puis c'est la nature c'est comme ça que je vois les choses [toux bruyante] oui non ce n'est pas sale vous savez tout ce qui vient de notre propre corps à nous eh bien on le trouve moins sale et répugnant que ce qui vient du voisin c'est comme ça [silence] et puis ce sont mes corps vous vous rendez compte [voix faussement indignée] c'est pas rien [il rallume une cigarette] c'est même assez émouvant on les revoit comme ça en paquet mais je me demande d'où ils viennent et qui s'en occupe aussi bien car moi je n'ai rien à faire ça se met en pile tout seul dans mon jardin [il continue d'une voix un peu contrainte par la cigarette qu'il a en bouche et qu'il vient d'allumer] Heureusement que je n'ai pas de voisins les pauvres [rire enroué] déjà pour l'odeur et puis ils se demanderaient ce que c'est que tout mon bordel [quinte de toux] mais quand même peut-être qu'il serait plus prudent de rentrer tout ça chez moi oui mais où ah je me le demande [bruit de bouche qui signifie « zut » puis on l'entend se gratter la tête] oui et puis ce serait du boulot de porter tout ça il y en a bien une centaine oh oui au moins [long silence] oui en définitive ils se détachent de moi et tombent par terre dans le jardin pendant mon sommeil [rires] je suis un peu comme un oignon qu'on épluche comme ça [il se lève en soupirant] je me demande quand tout ce manège se terminera parce qu'il faudra bien que ça cesse ça ne peut pas durer indéfiniment mon jardin serait trop petit ou alors c'est ça qu'on appelle l'éternité [il termine cette phrase en baissant un peu la voix, comme quelqu'un qui vient de comprendre quelque chose d'important] D'ailleurs moi je sens que ça commence à me fatiguer de donner un de mes corps dans mon sommeil pratiquement tous les jours on m'enlève quelque chose c'est pas anodin [il réfléchit en se grattant la nuque ou le menton] bon après tout on perd bien des poils des cheveux des ongles et même aussi nos dents et personne n'a rien à redire alors pourquoi pas un corps de temps en temps mais un peu plus vieilli à chaque fois de plus en plus [silence] bon je pense aussi aux peaux mortes et aux excréments mais c'est pas tout à fait pareil non plus [il a envie de rire mais il se retient] c'est peut-être normal ce qui m'arrive peut-être même que tout le monde est au courant et qu'on me l'avait caché [silence] Ce n'est pas moi qui m'empile tout seul tout de même il y a bien quelqu'un qui sait et qui ne me dit rien [puis, mots inaudibles] je trouve quand-même que j'ai vieilli quand je regarde les corps de ma jeunesse alors parfois je repousse une main un bras une jambe pour voir encore en-dessous un autre un peu plus jeune [silence] et il n'y a jamais d'intrus dans mon tas c'est toujours moi il n'y a ni amis ni membres de ma famille [longue pause] je me recueille sur ma tombe à l'air libre [il tousse] ce qui me surprend beaucoup c'est que les corps en théorie les plus jeunes donc au fond du tas ont des ossements qui sont plus vieux encore que mes os de vieillard ça c'est surprenant [reniflements puis il dit d'une voix émue] ils ont pourri les salauds il faudra que je me renseigne sur tout ça ça ne peut plus durer à la fin [il coupe le dictaphone]


SIXIÈME ET DERNIER ENREGISTREMENT


J'ai regardé dans mon encyclopédie [silence] ça ressemble aux mues on perd sa peau mais on est toujours en vie [silence, il réfléchit] ce qui veut dire que la mort c'est tout le temps tout le temps et même avec mon tas eh bien je ne sais pas exactement ce que c'est que la mort finale [pause] mais je suis lessivé [il soupire] je me remets de la mort comme d'une longue maladie [rires] merde alors il y a toujours les grandes questions et en plus j'ai mon tas [mots inaudibles, puis il coupe le dictaphone]


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Tilia

Touffu, l’arbre est bien bâti. Il est le blé des aïeuls, Le froment des mal lotis, La feuille en poudre à la meule Et, quand ses fleurs sont...